vendredi 7 février 2014

Après "Légion" - Premier chapitre

Je ne vous en donnerai pas encore le titre, mais depuis le temps que je vous fais attendre, je me devais de vous offrir un petit quelque chose de ce prochain roman. En l'occurrence, son tout premier chapitre.

Il fait suite à Légion, mais peut aussi totalement s'aborder indépendamment (même si ce serait dommage...).

Je ne puis encore vous donner de date de sortie précise, mais je vous le confirme : ça arrive !

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Chapitre Premier

C’était officiel : elle détestait sa voiture. Elle l’avait achetée deux ans plus tôt – une affaire semblait-il alors. Pensez donc : une "première main" avec même pas trente mille kilomètres au compteur, pour à peine la moitié de sa côte à l’argus !
Leurs premiers mois communs furent sans nuages, mais ont rapidement laissé la place à une succession de galères. D’abord un pneu crevé – rien de méchant. Puis une courroie de ventilateur qu’un garagiste peu scrupuleux, mais fort convaincant, avait réussi à lui surfacturer généreusement. Quand elle avait vu la note, elle avait cru à une blague et cherché la caméra cachée.
Puis d’autres tracas, encore, qui se succédaient comme les tics et les tacs d’un lent métronome : un par mois, invariablement. Sauf pour ce mois de février, à peine entamé, qui fêtait déjà sa seconde panne en sept jours. Sûrement la faute à l’année bissextile. Ou parce que, comme elle, la voiture en avait assez de se réveiller à quatre heures du matin.
Elle s’échinait sur la pédale d’embrayage en tournant rageusement la clef de contact. La Clio ronronna (non : ricana), toussa (s’étouffa de rire) puis se tut. Et merde.
Il n’y aurait pas de transport en commun avant une bonne heure. Elle pesta comme chaque jour contre son boulot qui l’obligeait à se lever à cette heure indue, puis se mit à insulter copieusement l’indocile mécanique, avant d’implorer sa pitié sur un ton aussi mielleux que forcé. Elle lui jura qu’elle lui offrirait une révision complète et même qu’elle irait jusqu’à repeindre sa carrosserie qui, il était vrai, en avait cruellement besoin. Elle tourna une nouvelle fois la clef de contact. La voiture, toujours aussi récalcitrante, laissa échapper un bref toussotement moqueur et hautain avant de se murer dans un silence indigné.
Elle leva furieusement les poings pour les abattre sur le tableau de bord, mais jamais elle ne les abaissa.
Le choc fut terrible. L’avant du véhicule implosa, le pare-brise vola en éclats. La violence de l’impact souleva l’arrière du véhicule du sol, projetant sa propriétaire hors de l’habitacle, comme si le cratère qui s’était formé dans le capot essayait de l’aspirer.
Elle glissa tête la première vers le trou dans le métal. Par réflexe, elle plaqua les bras contre la carrosserie, mais ne réussit à freiner sa chute que quand sa tête et ses épaules furent happées par la formidable déchirure. Son visage frôla l’amas informe de chair et d’os qui s’était niché dans la carlingue, là où se trouvait encore peu avant le moteur récalcitrant de son automobile. Alors, elle hurla.

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